Profils neuro-atypiques : effet de mode ou réalité clinique ?
- sandrinedeclerck99
- il y a 1 heure
- 5 min de lecture

Depuis quelques années, les termes HPI, TDAH, hypersensibilité ou encore troubles "dys" se retrouvent partout : séries télé, livres de développement personnel, tests en ligne, réseaux sociaux...
On se reconnaît dans un post Instagram, on s'identifie à une héroïne de fiction, et on se demande : "Et si j'étais HPI ? TDAH ? Hypersensible ?"
Si cette visibilité accrue a permis à de nombreuses personnes de mettre des mots sur leur différence, elle alimente aussi parfois des raccourcis, des auto-diagnostics hâtifs, voire une confusion entre traits de personnalité et véritable souffrance.
Alors, comment distinguer ce qui relève d'une réalité clinique de ce qui peut être un effet de mode ou un désir d'appartenance ?
1. Neuro-atypique : de quoi parle-t-on vraiment ?
Sous le terme “neuro-atypique”, on regroupe des fonctionnements neurologiques différents de la norme majoritaire. Il ne s’agit pas d’une pathologie, mais d’une autre manière d’être au monde.
Voici quelques profils courants :
TSA (Trouble du Spectre de l’Autisme) :
Le TSA regroupe des profils très divers, du plus léger au plus profond, avec un point
commun : une manière singulière de percevoir le monde. Les personnes autistes peuvent rencontrer des difficultés dans la communication sociale (implicites, second degré, interactions codées), mais développent souvent une vision très fine de certains détails.
On observe parfois :
Des intérêts spécifiques voire passionnels ;
Une sensorialité exacerbée (sons, lumières, textures) ;
Un besoin de routine et de stabilité pour se sentir en sécurité ;
Une difficulté à décoder les émotions d’autrui, mais pas un manque d’empathie pour autant.
À savoir : l’autisme au féminin ou chez les profils “camouflants” reste encore largement sous-diagnostiqué.
TDAH (Trouble Déficitaire de l’Attention avec ou sans Hyperactivité) :
Souvent caricaturé comme une simple “hyperactivité”, le TDAH est en réalité un trouble complexe de la régulation attentionnelle et émotionnelle.
Il se manifeste par :
Une difficulté à maintenir l’attention de manière constante, surtout sur des tâches peu stimulantes ;
Une impulsivité qui peut gêner les relations ou les prises de décision ;
Une hyperactivité motrice ou mentale (ruminations, pensées incessantes) ;
Une hypersensibilité émotionnelle mal comprise.
Mais aussi :
Une pensée intuitive, rapide et arborescente ;
Une créativité vive, une capacité à improviser, à rebondir, à s’enthousiasmer.
Le quotidien peut être épuisant sans outils de régulation adaptés, mais ce profil, bien accompagné, révèle une force d’adaptation incroyable.
HPI (Haut Potentiel Intellectuel) :
Le Haut Potentiel ne se limite pas à un QI supérieur à la moyenne. C’est un fonctionnement cognitif globalement plus intense, marqué par :
Une pensée en réseau, rapide, intuitive ;
Un sens aigu de la justice et du questionnement existentiel dès le plus jeune âge ;
Un décalage entre maturité intellectuelle et développement affectif ;
Un perfectionnisme parfois paralysant.
Souvent, les enfants HPI s’ennuient en classe car ils comprennent vite, mais leur intensité émotionnelle est mal interprétée. À l’âge adulte, cela peut générer un sentiment de décalage constant avec les autres, voire une fatigue à "jouer un rôle" socialement acceptable.
Hypersensibilité :
Loin d’être un trouble, l’hypersensibilité est un trait de tempérament qui concerne aussi bien les émotions que les perceptions sensorielles.
Elle se manifeste par :
Une réceptivité accrue aux stimuli (bruits, odeurs, ambiances… mais aussi émotions d’autrui) ;
Une forte capacité d’empathie, parfois jusqu’à l’épuisement émotionnel ;
Des montagnes russes internes : une émotion peut envahir toute la journée ;
Un besoin fort de sens, de cohérence, d’harmonie.
Hypersensibilité ≠ fragilité. C’est une intensité qui demande des outils pour être canalisée et non refoulée.
Troubles “dys” (dyslexie, dyspraxie, dyscalculie, dysphasie…) :
Ces troubles spécifiques des apprentissages ne relèvent ni d’un manque d’effort, ni d’un déficit d’intelligence.
Ils affectent une ou plusieurs fonctions cognitives :
Dyslexie : trouble de la lecture, de l’orthographe ;
Dyspraxie : trouble de la coordination gestuelle ou du schéma corporel ;
Dyscalculie : trouble du calcul et de la logique mathématique ;
Dysphasie : trouble du langage oral, de l’expression et/ou de la compréhension.
Ces profils sont souvent confrontés à l’incompréhension (“Mais tu es intelligent, pourquoi tu n’y arrives pas ?”) et nécessitent des aménagements spécifiques à l’école ou dans le milieu professionnel (outils numériques, temps supplémentaire, consignes adaptées…).
Et les profils mixtes ?
Dans la réalité, les frontières ne sont jamais nettes. Il est fréquent de croiser plusieurs profils chez une même personne :
Un enfant peut être HPI, dyslexique et hypersensible ;
Un adulte peut cumuler TDAH, TSA de haut niveau et troubles anxieux.
C’est ce qu’on appelle parfois les profils pluriels ou neurodiversité complexe. L’enjeu thérapeutique est alors de ne pas étiqueter, mais de comprendre le fonctionnement global, dans sa richesse, sa souffrance potentielle, et sa force adaptative.
2. Une vague de diagnostics... ou d'auto-diagnostics ?
Depuis la popularisation de séries comme HPI ou l'explosion de contenus TikTok « Si tu fais ça, tu es probablement neuro-atypique », beaucoup de personnes se questionnent. Certaines se reconnaissent dans les descriptions, s'identifient et... se diagnostiquent.
Mais entre effet miroir et réalité clinique, il y a un pas. Se sentir différent ne signifie pas être porteur d'un trouble.
À noter : un diagnostic fiable ne peut être posé que par un professionnel compétent (psychologue formé, neuropsychologue, psychiatre) à l'issue d'une évaluation rigoureuse.
3. Ce que ces profils vivent au quotidien

Malgré leur diversité, les personnes neuro-atypiques rencontrent souvent :
Une fatigue cognitive : besoin de plus d'énergie pour fonctionner en société, s'adapter, réguler leurs émotions.
Un sentiment de décalage : "Je ne pense pas comme les autres", "je vais trop vite ou pas assez vite pour le monde".
Des difficultés relationnelles : malentendus, rejet, suradaptation permanente.
Des troubles anxieux ou de l'estime de soi, conséquences d'années de remise en question ou de camouflage.
Certaines personnes sont passées à côté d'un diagnostic pendant des décennies, car leurs stratégies d'adaptation (notamment chez les femmes) rendaient leur différence "invisible".
4. HPI, TDAH... une identité ? une mode ? un malentendu ?
Les appellations neuro-atypiques peuvent parfois devenir des étiquettes rassurantes, une manière de donner du sens à des expériences de vie.
Mais attention à ce que cela n'efface pas la complexité de chaque individu, ni ne devienne un écran à d'autres souffrances psychiques.
Par exemple, se dire TDAH peut parfois masquer un trouble anxieux ou un stress post-traumatique. Se penser hypersensible peut cacher une blessure d'attachement. Se revendiquer HPI peut être une manière de survivre à une faible estime de soi.
Ce n'est pas le "label" qui guérit, c'est le travail de fond, dans un espace sécurisant, avec un professionnel.

5. S'accompagner avec justesse : pistes thérapeutiques et outils
La reconnaissance d'une neuro-atypie peut être une révélation libératrice. Mais ce n'est que le début d'un parcours d'intégration.
Des approches comme :
L'IFS (Internal Family System) : pour dialoguer avec les parties en conflit interne (le perfectionniste, le saboteur, l'enfant blessé...)
La théorie polyvagale : pour comprendre les réactions du système nerveux et favoriser l'ancrage.
La CNV (communication non violente) : pour exprimer ses besoins et poser ses limites.
La méditation de pleine conscience, le yoga, les pratiques corporelles douces : pour calmer le mental et se reconnecter à soi.
Ressources et outils utiles
📚 Livres :
🎧 Podcasts :
💻 Sites de référence :
Conclusion : sortir de la case pour revenir à soi

On ne réduit pas une personne à un acronyme. Derriere chaque HPI, TDAH, TSA, il y a un parcours, une histoire, un besoin de reconnaissance.
Le plus important n'est pas de savoir dans quelle case on entre, mais de créer un cadre où l'on peut être soi : pensant différemment, ressentant plus fort, apprenant autrement... et enfin entendu.
Sandrine Declerck, thérapeute à Paris 15ème, vous accompagne dans cette exploration de soi, au-delà des cases et au plus près de votre vérité intérieure.




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